Depuis des décennies, les chercheurs savent que le cerveau régit le diamètre des artères périphériques, ces vaisseaux qui transportent le sang vers les bras, les jambes, les mains et les pieds. Des impulsions électriques provenant du cerveau cheminent vers ces artères à travers un réseau de nerfs appelé « système nerveux sympathique » en ajustant la tension artérielle.
Une nouvelle recherche menée par des scientifiques à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa et à l’École de médecine de l’Université du Maryland (UM SOM) a permis de découvrir une voie selon laquelle le cerveau utilise un stéroïde inusité pour maîtriser la tension artérielle. Les résultats, publiés dans la revue Public Library of Science (PLOS) One , pointent vers de nouvelles approches pour traiter l’hypertension et l’insuffisance cardiaque.
La régulation des artères périphériques par le système nerveux sympathique est essentielle à la vie de tous les jours, mais ce mécanisme est souvent en hyperactivité chronique chez les patients atteints d’hypertension ou d’insuffisance cardiaque. En fait, plusieurs médicaments qui aident à soigner l’hypertension et l’insuffisance cardiaque agissent en réduisant l’activité du système nerveux sympathique.
Toutefois, ces médicaments peuvent avoir de graves effets secondaires, comme la fatigue, les étourdissements, la dépression et le dysfonctionnement érectile. « Ces inconvénients ont mené vers la recherche de nouvelles avenues pour inhiber l’action des nerfs sympathiques tout en causant moins de problèmes aux patients », explique Frans Leenen , M.D., Ph. D., directeur de la Clinique d’hypertension et du programme de recherche sur l’hypertension à l’Institut de cardiologie, et l’un des principaux auteurs de l’étude.
Travaillant avec un modèle animal d’hypertension, le Dr Leenen, en collaboration avec John Hamlyn, Ph.D., et Mordecai Blaustein, M.D., de l’UM SOM, a découvert un nouveau lien entre le cerveau et la tension artérielle élevée, à savoir un stéroïde peu connu appelé « ouabaïne ». L’étude est la toute première à révéler cette voie spécifique selon laquelle le cerveau régule le diamètre des artères par l’intermédiaire de l’ouabaïne dans la circulation sanguine, entraînant une élévation des protéines contractiles dans les artères. Cette nouvelle voie « chronique » agit de concert avec l’avenue plus « aiguë » du système nerveux sympathique pour gérer la fonction des artères et, par conséquent, contribuer à l’hypertension.
« Cette recherche nous propose une toute nouvelle approche pour comprendre comment le cerveau et le système cardiovasculaire travaillent ensemble », explique le Dr Hamlyn. « Elle ouvre une nouvelle voie fascinante sur laquelle nous pouvons travailler pour trouver des approches thérapeutiques novatrices qui pourraient un jour aider les patients. »
Fait intéressant, l’ouabaïne produite par les mammifères a une structure très similaire à l’ouabaïne végétale connue depuis longtemps de par son usage comme poison par les chasseurs africains qui en enduisaient leurs flèches. En fait, il subsiste une certaine controverse à savoir si les mammifères produisent vraiment de l’ouabaïne, une question que cette recherche devrait aider à élucider.
Le Dr Blaustein, qui étudie cette substance depuis 1977, explique que les médicaments qui bloquent les effets de l’ouabaïne pourraient améliorer la vie des gens atteints d’hypertension et d’insuffisance cardiaque. « Maintenant que nous comprenons le rôle de l’ouabaïne, nous pouvons commencer à chercher comment modifier cette nouvelle voie pour aider les personnes qui présentent des problèmes cardiovasculaires, ajoute le Dr Blaustein. Le potentiel est énorme. ».