Le cerveau, le cœur et l’esprit entretiennent des liens étroits entre eux. Si la maladie attaque un des trois, croient les chercheurs, le risque pour la santé des deux autres augmente.
Ces liens de dépendance ne sont guère surprenants quand on sait que les maladies cardiovasculaires et les troubles de santé mentale et cérébrale sont les principales causes de décès et d’invalidité au Canada.
La recherche et les observations cliniques révèlent d’importants liens entre les maladies cérébrales et cardiaques, notamment en ce qui a trait à leur manifestation et à leur évolution. Les patients atteints d’insuffisance cardiaque, par exemple, présentent un risque accru de dépression, de troubles cognitifs et de troubles du sommeil. Et pourtant, on traite encore souvent les affections cérébrales et cardiaques séparément, comme s’il n’y avait aucun lien entre elles, même lorsqu’elles sont présentes chez le même patient.
La chercheuse Jodi Edwards, Ph.D., espère changer les choses.
« La communauté médicale commence vraiment à reconnaître l’importance des comorbidités cérébrales associées aux maladies du cœur et vice versa, explique-t-elle. On prend de plus en plus conscience de l’étroitesse du lien entre le cœur et le cerveau. La compréhension de ces différences peut aider les fournisseurs de soins à personnaliser les traitements prodigués à ces populations vulnérables. »
Épidémiologiste de formation, la chercheuse a été recrutée en décembre 2017 pour diriger un nouveau programme de recherche sur les liens entre le cerveau, le cœur et l’esprit à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa (ICUO), qui a fait de ce domaine de recherche et d’innovation une de ses priorités stratégiques.
Aujourd’hui directrice du Programme de recherche sur le cerveau et le cœur à l'ICUO, Jodi Edwards travaille avec son équipe à analyser des données cliniques et administratives tirées de bases de données démographiques pour mesurer la contribution de facteurs de risque cardiovasculaire inexplorés – dont divers changements physiologiques associés à des changements précoces affectant la taille, la forme, la structure et la fonction du cœur – aux résultats cliniques des personnes présentant un risque élevé d’AVC, de fibrillation auriculaire, de déclin cognitif et de démence.
Le programme de Jodi Edwards repose sur trois piliers fondamentaux :
- Prédiction du risque : Conception de modèles uniques de prédiction du risque intégrant des indicateurs cardiaques, cérébraux et cognitifs dans le but de repérer les personnes les plus susceptibles de souffrir de problèmes cardiovasculaires.
- Comorbidités : Étude des comorbidités cardiovasculaires et de leurs impacts sur les résultats cliniques à court et à long terme des patients.
- Santé cardiaque et cérébrale des femmes : Élaboration de profils de risque sexospécifiques et étude des différences entre les sexes sur le plan des traitements et des résultats cliniques pour améliorer la santé cardiaque et cérébrale des femmes.
Jodi Edwards et son équipe, en partenariat avec l’Institut de recherche Sunnybrook et l’Institut de recherche en santé mentale du Royal, travaillent présentement à une étude multiphase intitulée CardiacDoc. La chercheuse espère que ce travail permettra bientôt la mise au point d’un modèle de soins cardiaques et cérébraux à l’Institut de cardiologie.
« L’étude CardiacDoc nous permettra de détecter immédiatement et de mieux traiter les patients atteints d’insuffisance cardiaque présentant une dépression, un déclin cognitif ou des troubles du sommeil concomitants, explique la chercheuse. L’étude appuiera aussi l'élaboration d’un nouveau modèle de soins intégrés et multidisciplinaires qui permettra à l’ICUO de se démarquer par son approche globale et personnalisée des soins cardiaques. »
Pour le moment, le message de Jodi Edwards aux patients est surtout de s’informer.
« Il faut que les patients comprennent que les facteurs qui contribuent au risque de maladie cardiovasculaire contribuent aussi au risque d’AVC et de démence, dit-elle. C’est particulièrement important pour les femmes, qui présentent peut-être des risques particuliers et méconnus. »
La bonne nouvelle, c’est que des changements qui optimisent le traitement et les habitudes de vie des patients atteints de maladies cardiovasculaires aideront aussi à prévenir les maladies cérébrales.
« Tout passe par la sensibilisation. Il est important pour les patients présentant ces facteurs de risque de comprendre tous les aspects de la situation et de discuter à la fois de santé cardiaque et de santé cérébrale avec leurs médecins », poursuit-elle.
Les recherches de Jodi Edwards ont été abondamment publiées dans de prestigieuses revues scientifiques, dont le Journal of the American Heart Association, Stroke, Neurology, et Alzheimer’s and Dementia, et ont suscité l’intérêt des médias nationaux. Elle est membre du groupe consultatif d’experts de la Fondation des maladies du cœur et de l’AVC du Canada, et de l’Alliance nationale de la santé cardiaque des femmes.
Jodi Edwards sera notamment conférencière lors du prochain Sommet canadien sur la santé cardiaque des femmes qui se tiendra les 2 et 3 avril 2020 à l'Hôtel Fairmont Château Laurier d'Ottawa.