Une approche inclusive pour aider les fumeuses à écraser

6 février 2019
On estime qu’une personne doit faire au moins 30 tentatives avant de réussir à arrêter de fumer pendant toute une année. (Chaiton et coll., 2016, en anglais)

Vous avez décidé que vous arrêtiez de fumer en 2019? Saviez-vous qu’une panoplie de facteurs influent sur votre capacité d’abandonner la cigarette pour de bon?

Natalie Hemsing a proposé une nouvelle approche pour aider les femmes à arrêter de fumer lors de la 11e Conférence annuelle d’Ottawa – Approches cliniques : nouvelles tendances en matière d’abandon du tabac le vendredi 18 janvier 2019.

Jusqu’à présent, le gros des messages et des recherches sur le tabagisme chez les femmes a surtout porté sur les dangers pour la grossesse, et non sur des questions de santé générale ou sur les facteurs sociaux qui jouent un rôle dans la dépendance au féminin, explique Natalie Hemsing, M.A., associée de recherche au Centre of Excellence for Women’s Health (CEWH) de Vancouver (Colombie-Britannique). D’autres recherches, croit-elle, sont nécessaires pour mieux guider l’abandon du tabac chez les femmes dans un objectif de santé générale.   

Les recherches du CEWH montrent qu’il faut approcher différemment l’abandon du tabac chez les femmes, car ces dernières ne commencent pas à fumer pour les mêmes raisons que les hommes et affrontent des défis différents lorsqu’elles essaient d’arrêter.

Bien que les fluctuations hormonales, la génétique, le métabolisme accéléré de la nicotine chez les femmes et d’autres facteurs liés au sexe puissent avoir une incidence sur la décision d’une femme de commencer à fumer ou d’arrêter, certains facteurs socioculturels entrent aussi en ligne de compte.

Les femmes fument souvent pour composer avec leurs humeurs, leurs émotions et leur stress, voire pour oublier temporairement les tracas de la maternité. La cigarette a déjà été associée à l’émancipation des femmes dans la publicité. Ces dernières sont aussi plus susceptibles de continuer à fumer pour éviter la prise de poids qui accompagne souvent l’abandon.

D’autres facteurs intersectionnels poussent les femmes à fumer, comme le fait de vivre dans la pauvreté ou d’avoir subi de la violence, un traumatisme ou de la discrimination fondée sur l’origine ethnique ou l’orientation sexuelle. Les hommes et les femmes autochtones sont aussi trois fois plus susceptibles de fumer en raison de facteurs culturels comme les traumatismes et un milieu de vie pro-tabac.

Kerri-Anne Mullen, Ph.D., s’est jointe à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa en 2006. Elle travaille auprès des patients qui essaient d’arrêter de fumer en tant que gestionnaire de programme au Modèle d’Ottawa pour l’abandon du tabac.

Kerri-Anne Mullen, Ph.D., est gestionnaire de programme au Modèle d'Ottawa pour l'abandon du tabac. Le tabagisme, explique-t-elle, ne pose pas les mêmes risques pour la santé des hommes et des femmes.

« En fait, le risque de mourir des suites de la maladie du cœur est plus élevé chez les fumeuses que chez les fumeurs, dit-elle. Les femmes sont plus susceptibles d’essayer d’arrêter de fumer, mais leur risque de rechute est aussi plus élevé, car elles ont tendance à ressentir davantage les symptômes de sevrage et des envies de fumer plus prononcées sous l’effet du stress. »

Quelle serait alors la meilleure façon pour les cliniciens d’aider les femmes à écraser?

« Les professionnels de la santé doivent tenir compte de tous les facteurs dans la vie d’une femme qui peuvent limiter sa capacité d’arrêter de fumer, dit Natalie Hemsing. Une approche holistique et inclusive est sans doute la plus susceptible de porter des fruits. »

La chercheuse a mentionné quatre avenues à explorer pour les cliniciens qui veulent aider les femmes à écraser pour de bon.

  1. Approches adaptées aux femmes, pour tenir compte de l’influence du genre et du sexe sur la consommation et l’abandon du tabac.
  2. Approches sensibles aux traumatismes, pour reconnaître le besoin de sécurité physique et affective des patientes qui ont subi un traumatisme.
  3. Approches visant la réduction des dommages, pour reconnaître l’importance de soutenir les femmes qui n’ont pas encore décidé d’arrêter de fumer.
  4. Approches sensibles aux inégalités sociales, pour reconnaître l’effet de facteurs comme la pauvreté, le racisme, l’isolement social, la violence et les traumatismes, les inégalités sexuelles et d’autres inégalités sur le risque de problèmes de santé liés au tabac. Il faudrait aussi que l’aide pour arrêter de fumer soit encore plus abordable pour les populations vulnérables.

Natalie Hemsing estime qu’il faudrait pousser la recherche sur les interventions potentielles, un créneau que sa recension de la littérature pourrait bien aider à développer.

Au Modèle d’Ottawa pour l’abandon du tabac, Kerri-Anne Mullen recommande l’association d’un médicament antitabagique à une thérapie de substitution de la nicotine pour maximiser les chances de succès des femmes qui essaient d’arrêter de fumer.

 « Nous recommandons à tous nos patients qui essaient d’arrêter de fumer de prendre des médicaments antitabagiques approuvés. Il est particulièrement important de faire cette recommandation aux femmes afin d'atténuer leurs symptômes de sevrage, de les aider en situation de stress et, du coup, de réduire le risque de rechute. »

- Kerri-Anne Mullen, Ph.D.

Natalie Hemsing a présenté les recherches du CEWH sur le tabagisme chez les femmes à la 11e Conférence annuelle d’Ottawa – Approches cliniques : nouvelles tendances en matière d’abandon du tabac.

Si vous souhaitez arrêter de fumer, sachez que l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa offre un Programme d'abandon du tabac dirigé par le Dr Andrew Pipe, un chef de file reconnu de la recherche clinique sur l’abandon du tabac.