Avec la troisième vague et la hausse du nombre de cas, d’hospitalisations et d’admissions aux soins intensifs, le danger au Canada a atteint son plus haut niveau depuis le début de la pandémie il y a un an.
On se croirait parfois au douzième round d’un match de boxe face à un adversaire encore frais comme une rose.
La bonne nouvelle, c’est que toutes les pandémies ont une fin. Le Canada finira nécessairement par s’en sortir. Ce qu’on ignore, c’est quand.
The Beat a invité le Dr Peter Liu, directeur scientifique et vice-président à la recherche à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa (ICUO), à donner son point de vue sur la pandémie au Canada.
Le Dr Liu s’est récemment vu remettre le Prix d’excellence internationale 2020 pour son leadership dans l’avancement des connaissances sur les conséquences cardiovasculaires de la COVID-19.
Le scientifique exhorte tous les Canadiens et Canadiennes, ainsi que les patients cardiaques, à prendre toutes les précautions nécessaires pour se protéger. Il encourage tout le monde à agir de façon proactive pour se faire vacciner et à ne pas « magasiner » les vaccins, c'est-à-dire attendre qu’une certaine marque soit disponible.
Voici un condensé de cet entretien.
The Beat : Dr Liu, que pensez-vous de l’état de la pandémie au Canada?
Dr Peter Liu : La situation est vraiment en train de nous échapper. Aux États-Unis, les taux de mortalité ont chuté en raison du déploiement rapide de la vaccination. Les variants ne s’y propagent pas à un rythme aussi effréné qu’ici. Les variants nous ont frappés de plein fouet. De toute évidence, ils se propagent librement en Ontario, en Colombie-Britannique et au Québec.
Parlez-nous du variant B.1.1.7. En quoi est-il différent de la souche initiale du virus?
Parfois appelé « variant britannique », le variant B.1.1.7 a émergé au Royaume-Uni, alors que le pays se trouvait dans une vague d’infection majeure. Il se transmet beaucoup plus facilement que le SARS-COV-2, la souche initiale du virus. Il rend aussi plus malade, entraîne des séjours plus longs aux soins intensifs et peut infecter les plus jeunes. Selon certaines données, ce variant serait au moins 50 % plus virulent. Le danger est donc double : si vous contractez le virus, il peut vous rendre très malade.
Comment fonctionne le variant B.1.1.7? Pourquoi est-il si contagieux?
Le variant B.1.1.7 a acquis une mutation avantageuse de la protéine de spicule. Le spicule est ce qui distingue le coronavirus des autres virus. La protéine de spicule est la clé dont le virus se sert pour entrer dans les cellules humaines. Un peu comme un cambrioleur qui entre par effraction dans une maison, la COVID-19 utilise des outils pour s’infiltrer dans nos cellules et se multiplier. Or, le variant B.1.1.7 utilise une clé beaucoup plus sophistiquée que le simple « crochet » de la souche initiale. L’infiltration est beaucoup plus rapide et la propagation, beaucoup plus efficace.
Est-ce que le vaccin nous protège du variant B.1.1.7?
Les données dont on dispose indiquent que la plupart des vaccins disponibles sont efficaces contre le variant B.1.1.7, mais un peu moins contre les variants sud-africain et brésilien. Malgré tout, les vaccins demeurent sans contredit notre meilleur moyen de défense. Une population dans laquelle un grand nombre de personnes n’ont reçu qu’une seule dose et d’autres ne sont pas vaccinées est un terrain fertile pour les variants. Dans cette situation, le virus apprend comment nos systèmes de défense fonctionnent et il évolue pour les déjouer.
Que faut-il faire pour freiner la propagation?
La vaccination complète est le seul moyen de freiner la transmission. Les gens sont fatigués de rester à la maison et de ne pas pouvoir socialiser, mais les variants nous laissent peu de marge de manœuvre. Ce n’est qu’en instituant un confinement strict de plusieurs mois et en vaccinant sa population au plus vite que le Royaume-Uni a pu reprendre le dessus du variant B.1.1.7. Le pays vient tout juste de commencer à déconfiner. Aux grands maux, les grands remèdes. Les demi-mesures ne font qu'accentuer notre vulnérabilité. Il faut aussi absolument accélérer le rythme de la vaccination.
Ne magasinez pas votre vaccin. Dès qu’il est possible d’obtenir un vaccin approuvé par Santé Canada, quel qu’il soit, sautez sur l’occasion.
- Dr Liu
Quel est le bon vaccin?
Les données à ce jour indiquent que tous les vaccins approuvés sont sécuritaires et protègent de la forme grave de la COVID-19. Ne magasinez pas votre vaccin. Dès qu’il est possible d’obtenir un vaccin approuvé par Santé Canada, quel qu’il soit, sautez sur l’occasion. Plus vous attendez une marque de vaccin en particulier — et plus vous êtes nombreux à attendre —, plus ce sera long avant que le Canada atteigne l’immunité collective. La meilleure chose à faire pour votre santé et celle de tous les Canadiens et Canadiennes est de vous faire vacciner dès que vous le pouvez*.
Qu’en est-il des patients cardiaques? Avez-vous un message à leur transmettre?
Il est important pour les patients cardiaques de prendre soin de leur santé. Redoublez de prudence. Ne sortez que pour les déplacements essentiels ou pour faire de l’exercice. À l’extérieur, tenez-vous dans les grands espaces ouverts et pratiquez la distanciation physique. Maintenez vos bonnes habitudes de vie : nourrissez-vous bien, évitez de prendre du poids, gérez votre stress, dormez suffisamment. Suivez votre plan de traitement et continuez de prendre vos médicaments selon l’ordonnance. Prendre soin de votre cœur est une des meilleures façons de vous protéger du virus. Enfin, agissez de façon proactive pour vous faire vacciner.
Plusieurs revues scientifiques prestigieuses et grands médias du monde ont consulté le Dr Liu pour son expertise et sa compréhension des impacts de la COVID-19 sur le système cardiovasculaire.
* Consultez toujours votre fournisseur de soins de santé primaire pour toute question relative au vaccin contre la COVID-19 et à votre état de santé.