Les dispositifs cardiaques électroniques implantables (DCEI) sauvent des vies, cela ne fait aucun doute. Les infections sont rares, mais peuvent entraîner des complications graves qui mettent la vie du patient en danger. L’année dernière, la recherche a démontré que l’utilisation soutenue d’antibiotiques au moment de l’implantation du dispositif ne réduisait pas significativement le risque d’infection.
C’est là une des principales conclusions de l’étude PADIT (Prevention of Arrythmia Device Infection Trial) qui visait à vérifier l’efficacité clinique de l’administration périopératoire d’antibiotiques par incrémentation pour réduire le risque d’infection associé aux dispositifs implantables. Pendant quatre périodes de six mois, aléatoirement assignées, les chercheurs ont analysé les données de plus de 19 500 patients répartis entre 24 centres hospitaliers, dont 20 au Canada et quatre en Hollande. À ce jour, il s’agit de la plus vaste étude jamais entreprise sur les DCEI.
Les données recueillies n’ont pas permis de tirer des conclusions statistiquement significatives, mais elles ont poussé les chercheurs à se pencher sur une toute nouvelle question, affirme le Dr David Birnie, cardiologue-électrophysiologue, chef adjoint de la Division de cardiologie à l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa et membre du comité directeur de PADIT. La fameuse question : est-il possible de prédire le risque d’infection chez un patient donné avant l’implantation du dispositif cardiaque ? Pour le Dr Birnie, la réponse, en général, est « oui ».
« Nous avons observé qu’il était possible d’estimer [le risque d’infection chez un patient] de façon très précise à l’aide du système de pointage que nous avons élaboré. »
- Dr David Birnie, cardiologue-électrophysiologue, Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa
« Nous avons observé qu’il était possible d’estimer [le risque d’infection chez un patient] de façon très précise à l’aide du système de pointage que nous avons élaboré ». Le système en question, dit-il, est « très convivial pour les médecins et les patients [et] devrait être facilement adopté dans la pratique clinique une fois passée l’étape de l’évaluation par les pairs. »
En mai 2019, le Dr Birnie a pris la parole lors des 40es séances scientifiques annuelles de la Heart Rhythm Society à San Francisco (É.-U.), afin de présenter les dernières nouvelles concernant l’étude PADIT. À partir des données recueillies dans le cadre de l’étude initiale, les chercheurs ont établi cinq indicateurs indépendants d’infections liées aux dispositifs. En se fondant sur leurs conclusions, ils ont élaboré un nouveau système de pointage pour évaluer le risque d’infection chez les patients candidats à l’implantation d’un DCEI.
Voici comment le système de pointage PADIT fonctionne : chaque patient se voit attribuer un certain nombre de points selon l’intervention qu’il doit subir et ses antécédents médicaux. Le niveau de risque est fonction du nombre total de points accumulés (sur un maximum de 14 points).
- Les patients dont c’est la deuxième intervention obtiennent un point. Ceux dont c’est la troisième ou plus obtiennent 4 points.
- Les patients de 60 à 69 ans obtiennent un point. Les patients de moins de 60 ans, deux.
- La diminution de la fonction rénale ajoute un point.
- Un système immunitaire affaibli en raison d’une maladie ou d’une pharmacothérapie équivaut à trois points.
- Enfin, des points sont aussi attribués selon le type d’intervention prévue : deux points pour un défibrillateur automatique implantable, quatre pour un traitement de resynchronisation cardiaque et cinq pour une reprise chirurgicale ou la mise à niveau d’un DCEI déjà implanté.
Pure coïncidence (ou peut-être pas!), les cinq éléments de ce système de prévision des risques reprennent l’acronyme anglais de l’étude pour laquelle ils ont été conçus : PADIT, c’est-à-dire, « Prior procedure » (interventions déjà subies), « Age » (âge), « Depressed renal function » (fonction rénale affaiblie), « Immunocompromised » (système immunitaire affaibli) et « Type of procedure » (type d’intervention).
Le risque d’infection d’un patient qui obtient moins de quatre points est considéré comme faible. Un résultat entre cinq et six points est associé à un risque modéré ou intermédiaire. Un résultat supérieur à sept points indique au médecin un risque accru d’infection grave.
À titre d’exemple, le Dr Birnie estime qu’un patient âgé de 85 ans souffrant d’insuffisance rénale et ayant besoin de changer la pile de son dispositif accumulerait au moins sept points. Selon Dr Birnie, chez ces patients, la probabilité de développer une infection grave et potentiellement mortelle est d’environ 4 %. Cette probabilité, qui peut sembler faible, est néanmoins préoccupante.
« Un résultat de sept points ou plus peut indiquer que le risque potentiel pour le patient est plus important que les avantages qu’il tirerait d’un nouveau dispositif, dit-il. Le système de pointage PADIT aidera grandement les médecins à prendre des décisions importantes avec leurs patients, et permettra aussi de définir d’autres mesures de prévention des infections associées aux DCEI. »
Bien entendu, une validation plus approfondie, voire des modifications, sera nécessaire, indique le Dr Birnie. L’échelle d’infection PADIT devra entre autres être validée par une cohorte indépendante.
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Écoutez le Dr David Birnie discuter de l’étude sur la prévention des infections liées aux dispositifs de traitement des arythmies (PADIT) et de la création de la cote de risque d’infection PADIT lors de la 40e édition annuelle des Heart Rhythm Scientific Sessions tenue cette année à San Francisco, aux États-Unis [vidéo en anglais seulement, filmée sur place par Radcliffe Cardiology].