L’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa (ICUO) met en place un réseau pour améliorer la prévention et le traitement des maladies cardiovasculaires (MCV) chez les femmes. Cofinancé par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) et la Fondation de l’ICUO, le projet est évalué à plus de 1,2 million de dollars, somme à laquelle s’ajoutent certaines contributions en nature.
Les MCV sont la première cause de décès chez les femmes de plus de 35 ans dans le monde; chaque année, elles font plus de victimes que tous les types de cancers confondus. Devant une situation si alarmante, comment se fait-il que les femmes n’en sachent toujours pas plus sur leur santé cardiaque?
La Dre Thais Coutinho dirige la Division de prévention et de réadaptation cardiaque de l’ICUO et préside le Centre canadien de santé cardiaque pour les femmes (CCSCF), l’organisme derrière l’Alliance canadienne de santé cardiaque pour les femmes et la journée Tout le monde en rouge qui se tient annuellement en février. Elle souligne que si l’on constate un déclin des maladies cardiovasculaires chez les hommes, celles-ci sont en progression chez les femmes.
« Je considère comme une victoire tout ce qui nous permet de rattraper cet écart et d’assurer aux femmes de l’information et des soins de la même qualité que ceux reçus par les hommes. »
- Dre Thais Coutinho
« Je considère comme une victoire tout ce qui nous permet de rattraper cet écart et d’assurer aux femmes de l’information et des soins de la même qualité que ceux reçus par les hommes, soutient la Dre Coutinho. Ce que nous voulons, c’est voir les femmes vivre plus longtemps et plus sainement. Nous souhaitons qu’elles prennent davantage soin de leur santé cardiaque, qu’elles soient plus nombreuses à connaître leurs facteurs de risque et à pouvoir identifier les signes et les symptômes des maladies cardiovasculaires avant qu’il ne soit trop tard. »
Kerri-Anne Mullen, directrice de programme au CCSCF, copilotera le projet aux côtés de la Dre Coutinho. Elle fait remarquer qu’il y a longtemps qu’on a systématisé le dépistage précoce et le traitement des cancers, qui font d’ailleurs l’objet de mesures incitatives à différents niveaux. Pourtant, même si les maladies cardiovasculaires et leurs facteurs de risque sont beaucoup plus répandus chez les Canadiennes, un tel système se fait toujours attendre.
Le réseau de prévention des MCV travaillera à mieux faire connaître les facteurs de risque qui touchent tout particulièrement les femmes, comme certains problèmes liés à la grossesse, les troubles rhumatologiques auto-immuns et la ménopause. Ce faisant, il tâchera aussi de systématiser divers processus visant à prioriser et adapter le dépistage, l’évaluation, le diagnostic et le traitement de ces maladies et de leurs facteurs de risque chez les femmes.
« On doit pouvoir compter sur un système mieux intégré et plus complet, capable d’aiguiller les femmes vers des ressources et des interventions là où elles habitent, avant que leur état ne dégénère. »
- Kerri-Anne Mullen, Ph.D.
« On doit pouvoir compter sur un système mieux intégré et plus complet, capable d’aiguiller les femmes vers des ressources et des interventions là où elles habitent, avant que leur état ne dégénère », explique Kerri-Anne Mullen.
Le réseau, dont les activités principales seront soutenues par des membres du CCSCF, fera appel au savoir-faire de spécialistes de la santé cardiovasculaire, de médecins de première ligne, de groupes de soins aux communautés autochtones et sud-asiatiques, d’obstétriciens, de gynécologues, de professionnels de la santé mentale, d’experts en activité physique et en abandon du tabac, de diététistes et de responsables politiques de partout en Ontario.
Des femmes qui vivent avec une maladie cardiovasculaire ou qui sont à risque d’en souffrir – tout particulièrement les femmes d’ascendance autochtone ou sud-asiatique et celles qui ont été atteintes d’un trouble hypertensif pendant leur grossesse – seront aussi consultées tout au long du projet.
« En plus d’effectuer un travail de fond, notre personnel évaluera les besoins et documentera les lacunes en matière d’information et de prestation des soins, poursuit Kerri-Anne Mullen. Pour mieux constituer le réseau, il cherchera aussi à déterminer si l’on peut s’inspirer d’autres modèles ayant déjà fait leurs preuves. Nous parlerons avec des femmes et des fournisseurs de soins de santé et préparerons des sondages pour bien comprendre quels sont les besoins et les solutions privilégiées. En outre, nous voulons savoir quels sont les bons coups, les points à améliorer et les écarts à combler en santé cardiaque des femmes. »
Le CCSCF, ses partenaires et diverses parties prenantes comptent se rencontrer pour une séance de réflexion; ils y seront appelés à se familiariser avec le contexte actuel, à définir les problèmes, à mettre leurs idées en commun et à hiérarchiser les solutions à mettre de l’avant. L’exercice permettra au Centre de cibler quelques initiatives clés à transformer en prototypes et en projets pilotes.
Par exemple, il pourrait en émerger un éventail de produits d’information, ressources pédagogiques, protocoles de dépistage des facteurs de risque, algorithmes de prise en charge et de suivi, outils d’aide à la prise de décision, structures de remontée des informations, mesures incitatives pour la pratique, documents infographiques et applications technologiques. Après avoir évalué l’efficacité des différentes solutions, le réseau pourra déterminer lesquelles valent la peine d’être élargies et intégrées à la prochaine étape du projet.
Il reste beaucoup à faire pour améliorer la prévention et le traitement des maladies cardiovasculaires au féminin, mais l’annonce de l'ICUO la semaine dernière marque une étape importante dans l’histoire de la santé cardiaque des femmes.
« Ce qui compte, c’est que nous sommes aujourd’hui en mesure de poser les bases de projets à mettre en place à long terme », conclut Kerri-Anne Mullen.
Le Fonds pour la santé des Canadiens et des communautés de l’ASPC investit dans des projets conçus pour lutter contre les inégalités en santé, encourager la participation multisectorielle à la prévention des maladies chroniques et découvrir de nouvelles façons de s’attaquer aux facteurs de risque de ces maladies. L’ASPC a subventionné le projet à hauteur de quelque 568 000 $, somme qui a été doublée par la Fondation de l’ICUO.