Lors de deux discussions animées, Peter Liu, M.D., directeur scientifique de l’Institut de cardiologie de l’Université d’Ottawa, a donné une vue d’ensemble de la situation. Dans son exposé en séance plénière de la « Journée Vasculaire », le Dr Liu a mis en lumière les liens inextricables qui existent entre la santé vasculaire et le vieillissement. Le vieillissement vasculaire donne lieu à des complications vasculaires comme la perte d’élasticité des vaisseaux sanguins et l’augmentation de la tension artérielle. Des recherches menées sur des momies ont montré que la présence de maladie coronarienne était liée à l’âge il y a des milliers d’années déjà, de sorte que les facteurs de risque modernes n’expliquent pas tout. La maladie vasculaire est le résultat d’une combinaison du vieillissement et de facteurs de risque.
Notre contrôle de la qualité sur la production de protéines se dégrade avec le temps en raison de l’oxydation et d’erreurs dans le pliage des protéines. Les mécanismes d’élimination qui nous débarrassent des déchets et des molécules anormales deviennent engorgés et les détritus s’accumulent, ce qui a des conséquences sur les organes de tout le corps, allant du cerveau au pancréas en passant par le système vasculaire.
Le vieillissement complexifie nos mécanismes inhérents de contrôle de la qualité qui s’activent par l’entremise de réponses immunitaires déclenchant l’inflammation systémique. Ce processus, bon pour lutter contre les pathogènes et maîtriser l’inflammation systémique, allait dans le sens du progrès quand l’espérance de vie était plus courte. Or, quand nous vieillissons, ce même processus devient un important facteur contributif de la maladie chronique. La présence de cellules inflammatoires transforme et endommage nos vaisseaux sanguins.
Pouvons-nous intervenir sur ce processus? Dans des organismes modèles comme les mouches des fruits, les vers plats et les rats, il a été démontré que des régimes alimentaires faibles en calories ralentissaient le métabolisme et réduisaient la production de radicaux libres. Il en résulte un ralentissement du vieillissement et une prolongation de la durée de vie, mais nous ignorons encore si ces bienfaits se traduisent de la même manière chez les humains. Nous devons trouver des techniques pour éliminer les protéines endommagées et modifier la production de protéines anormales. Nous devons trouver des façons de favoriser les réponses inflammatoires.
Faisant écho au plaidoyer du Dr Andrew Pipe en faveur de l’activité physique (voir « N’ayez pas peur de prescrire de l’exercice »), le Dr Liu souligne que l’exercice est la principale chose qu’une personne peut faire pour elle-même pour influencer tous ces processus de vieillissement.
Dans son second exposé présenté dans le cadre d’un symposium « à la fine pointe », le Dr Liu a jeté un regard sur l’histoire et sur l’avenir des biomarqueurs dans le domaine des soins cardiovasculaires. En médecine cardiovasculaire, les biomarqueurs sont souvent utilisés comme des indicateurs de la maladie ou des mesures du risque. C’est le cas de la troponine pour la crise cardiaque, des lipoprotéines de faible densité (cholestérol LDL) et de la protéine C-réactive pour la maladie coronarienne, du bA1c pour la glycémie et le diabète, et du peptide natriurétique cérébral (PNC) pour l’insuffisance cardiaque.
Il existe bien d’autres biomarqueurs connus, mais pour servir à des fins cliniques, ils doivent être sensibles, spécifiques et générer des résultats reproductibles. Ils doivent aussi avoir une incidence sur la prise de décision et être rentables.
En 1976, Robert Roberts, M.D., président-directeur général de l’Institut de cardiologie, était responsable de faire de la créatine kinase un biomarqueur pratique de la crise cardiaque. Il a fallu 10 autres années avant qu’elle soit largement acceptée. On a découvert plus tard que la troponine était plus spécifique, et elle a supplanté la créatine kinase depuis.
Adolfo de Bold, Ph.D., scientifique de longue date à l’Institut de cardiologie, a découvert le peptide natriurétique auriculaire (PNA) et la fonction endocrinienne du cœur dans les années 1980. Cela a mené à la découverte et à l’utilisation du PNC comme biomarqueur de l’insuffisance cardiaque. Le PNC a d’abord été utilisé pour évaluer le pronostic, mais il sert maintenant au diagnostic. Le PNC peut aussi être utilisé pour orienter le traitement.
En 2007, une équipe de l’Institut de cardiologie dirigée par le Dr Roberts a découvert le variant 9p21, le plus important facteur de risque génétique de maladie cardiovasculaire. Les biomarqueurs génétiques ne sont pas encore utilisés cliniquement, parce qu’ils ne fournissent pas encore de renseignements capables d’orienter les soins. Cependant, le test RAPID GENE développé par l’Institut de cardiologie, tout premier test génétique administré au chevet du patient, peut être utilisé pour guider l’anticoagulothérapie.
Il conclut en disant que dans l’avenir, disons d’ici 2020, on peut imaginer que le dépistage génétique sera une pratique courante ou qu’un simple timbre adhésif appliqué sur la peau pourra prévenir de l’imminence d’une crise cardiaque. Les recherches du Dr Liu ciblent la découverte de nouveaux biomarqueurs pour répondre aux besoins cliniques en matière d’insuffisance cardiaque.